Wiki Guy de Rambaud
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                  Jeanne Laisné, ou Fourquet dite Jeanne Hachette

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Jeanne Hachette et la bannière qu'elle prend aux Bourguignons à la portes de Bresles, le 27 juin.

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Louis XI et Charles le Téméraire.

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Tous les ans, Beauvais commémore par des fêtes importantes la résistance de Jeanne Hachette et la population de la ville à l'ennemi.

Jeanne Laisné, ou Fourquet dite Jeanne Hachette, reçoit du Maréchal de France Joachim Rouhault de Gamaches (1409 - 1478) le surnom d'Hachette. Ce surnom ayant été approuvé par le Roi, Jeanne va être désormais depuis appelée Jeanne Hachette. Elle est née le 14 novembre 1454, à Beauvais; dans l'actuelle rue Jeanne Hachette[1][2]. Jeanne est décédée, après 1478[3], dans la même ville et est enterrée dans le cimetière de La Madeleine de Beauvais.


Jeanne Hachette et d'autres héroïnes de Beauvais contribuent puissamment à la retraite des Bourguignons de Charles le Téméraire le 22 juillet 1472 du siège de la ville.

Par lettres patentes de 1493, Louis XI leur accorde, en témoignage de contentement, le droit de précéder les hommes à la procession et à l'offrande le jour de Sainte-Augadrême, patronne de la ville. Jeanne Hachette se fait remarquer, paraît-il, entre toutes, en montant à la muraille et arrachant des mains d'un soldat un étendard des Bourguignons. Elle donne cet étendard à l'église des Jacobins[4].

Son rôle dans cette bataille est considérable et les patriotes en font une Jeanne d'Arc laïque. Jeanne est une figure emblématique de la résistance française face à Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, allié de nos ennemis. Elle répare la trahison de son père, officier de Louis XI, par son attitude héroïque, en 1472, lors du siège de la ville de Beauvais[5], alors une des premières et principales clefs de la France [6].

La conséquence est que certains catholiques royalistes mettent en doute jusqu'à son existence. Dans la 2e moitié du XXe siècle l'extrême-gauche voit une invention, un fausse de ces fausses vierges catholiques et patriotes.

Mais Antoine Loysel, célèbre jurisconsulte, Antoine Loysel, dans ses Mémoires des pays, villes, comté et comtes, évesché et évesques, pairrie, commune et personnes de renom de Beauvais et Beauvaisis, éditée en 1617, p. 255, consigne, sur Jeanne Hachette et sur les femmes de Beauvais...[7].

En effet le Roi, Louis XI, octroie, par lettres patentes, une exemption d'impôts à vie à Jeanne Laisné, dite Fourquet, pour considération de la bonne et vertueuse résistance qui fut faite par qui fut faite par notre chère et bien-aimée Jeanne Laisné[8]. Louis XI marie Jeanne Hachette avec Colin Pilon en 1474. S'il lui accorde une exemption d'impôts à vie c'est qu'elle n'est pas cardeuse de laine ou fruitière et poissarde

Celle qui doit son surnom à la petite hache, dont elle se sert pour combattre, en 1472, Charles le Téméraire, à Beauvais y a sa statue, des collèges et des centres commerciaux ou culturels. Elle est depuis des siècles, une héroïne. Jusqu'au cinéma, dans le film Le Miracle des loups, de Raymond Bernard, en 1924.

Jeanne Hachette n'est pas Blandine aux lions ou une héroïne chrétienne. On retrouve chez ce personnage historique qui devient une figure de légende la continuité sous-jacente d'un type indo-européen de déesse trivalente, à la fois souveraine, féconde et guerrière [9].

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L'assaut du 27 juin 1472 : toile d'Alexandre Grellet visible à la cathédrale de Beauvais.

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SA FAMILLE ET SA JEUNESSE[]

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Sa famille[]

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Jean Fourquet, son père, meurt lors de la bataille de Montlhéry (1465).

Au niveau des légendes Jeanne Laisné est cardeuse de laine, la fille d'un artisan, Matthieu Laisné. Du temps de la Révolution elle est même une fruitière et poissarde[10].

Son père, Jean Fourquet, est originaire de Pont-Sainte-Maxence. D'abord maître artisan[11], il devient par son mérite l'un des officiers supérieurs des gardes du palais de Louis XI. C'est de son père que son descendant prennent le nom de Fourquet d'Hachette ou que Jean-Chrétien Ferdinand Hoefer l'appelle Jeanne Fourquet, surnommée Hachette[12].

Sa mère meurt en lui donnant le jour, le 14 novembre 1454, à Beauvais, dans l'actuelle rue Jeanne Hachette[13].

Son père perd la confiance du roi. Il perd son grade. Alors ce Jean Fourquet, pour se venger, trahit son souverain, et embrasse le parti des princes qui se liguent contre Louis XI. L'ex-officier supérieur des gardes du palais de Louis XI, meurt lors de la [bataille de Montlhéry, le 14 juillet 1465], entre Louis XI et le duc de Berry[14]. Louis Marie Prudhomme dans sa Biographie universelle et historique des femmes célèbres mortes ou vivantes écrit :

Comme on voit, de tous les temps il y a eu des hommes que l'amour des honneurs et des dignités a rendus assez lâches pour trahir leur prince ou livrer leur patrie [15].

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Sa jeunesse (1454 - 1472)[]

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Jeanne Laisné, par Nicolas-Henri Jacob.

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Le vieux Beauvais.

Revenons à Jeanne Hachette. Elle est élevée par une dame Laisné jusqu'à ses 18 ans. C'est l'Intendante des l'hôtel des gouverneurs de Beauvais[16], ce qui explique le rôle de Jeanne lors du siège. Elle n'est pas noble, mais elle connaît les officiers et comme le Roi va lui accorder une exemption d'impôts à vie c'est qu'elle n'est pas pauvre.

Avant 1465, Jean Fourquet est forcé par son devoir d'habiter à la cour du Roi. Il ne peut que très rarement s'en absenter pour aller à Beauvais visiter ses enfants[17].

La mort de Jean Fourquet, bien loin d'affaiblir les tendres sentiments de Madame Laisné pour Jeanne et son cousin germain, leur donne une nouvelle force, car elle adopte ces deux enfants. Elle n'a alors pour toute ressource que le revenu de sa place d'intendante. Jeanne prend le nom de sa mère adoptive, Laisné[18].

Aussitôt que Jeanne - qui a déjà 11 ans en 1465 - et son cousin Jean-Pierre sont assez âgés pour comprendre et apprécier tout ce que leur mère adoptive fait pour eux, ils s'empressent de lui en témoigner leur reconnaissance, en l'aidant de leur mieux dans les travaux que les devoirs de sa place d'intendante lui imposent chaque jour.

La dame Laisné n'est ni riche, ni misérable, mais comme tous les habitants de Beauvais ou d'Orléans, elle narre à ses enfants adoptifs les exploits de Jeanne d'Arc.

De l'avis de tous, Jeanne a de la beauté, de l'expression, beaucoup d'esprit, de courage et de cœur. On la dit laborieuse et économe.

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LA GUERRE[]

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Les alliances de Charles le Téméraire[]

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Le Duché de Charles le Téméraire est immense et il a de nombreux alliés. Beauvais (triangle bleu) est une place-forte qui barre la route de la Normandie à son armée de 80.000 hommes.

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Charles de France, allié de Charles le Téméraire, a t'il été empoisonné sur ordre de Louis XI ?

En 1471, Louis XI (1423 - 1483), fils de Charles VII, règne depuis dix ans. Il déteste son cousin bourguignon, Charles le Téméraire, qui aspire à régner. Mais, là, il lui faut compter avec l'Angleterre.

En 1471, l'interminable conflit qui oppose les Yorks et les Lancasters pour le contrôle du royaume s'achève par la victoire des Yorks. Charles le Téméraire, qui a épousé en troisièmes noces Marguerite d'York (1446 - 1503), est donc le beau-frère du vainqueur, devenu Edouard IV. Il est aussi l'héritier des vaincus, les Lancasters, par sa mère, Isabelle de Portugal, leur dernière descendante. Il peut donc tenter de relancer un conflit en se réclamant du trône d'Angleterre.

Mais, au même moment, en France, se joue un autre enjeu dynastique qui le requiert aussi. Si Louis XI règne, son jeune frère, Charles de Guyenne (1446 - 1472), de vingt-trois ans son cadet, complote contre lui. Héritier probable, puisque le dauphin, qui n'a pas deux ans, n'est pas assuré d'atteindre l'âge adulte. Charles de France, duc de Guyenne s'allie au Bourguignon contre le roi de France.

Charles le Téméraire est l'allié de Jean II d'Alençon. Louis XI doit aussi lutter contre le duc François II de Bretagne.

Le 3 octobre 1471, la France et la Bourgogne signent le Traité du Crotoy par lequel Louis XI s'engage à rendre au Téméraire les villes d'Amiens et de Saint-Quentin[19].

En novembre 1471, conformément à la clause de non-respect incluse dans le traité de Péronne (que Louis XI a, de son côté, fait annuler un an plus tôt), Charles le Téméraire se déclare affranchi de la suzeraineté du roi de France.

Par chance pour Louis XI, Guyenne est très malade. Tuberculose ou syphilis, il meurt le 24 mai 1472. Impatient de récupérer les terres de son cadet, dont il annonce même la mort avec une semaine d'avance, Louis XI s'empare de La Rochelle, place forte emblématique, puisque porte de la Guyenne. Sa position étant renforcée, Louis XI refuse d'appliquer le Traité du Crotoy poussant le bouillant duc de Bourgogne à passer à l'action[20].

En dépit de ses 38 ans, Charles le Téméraire a toujours pris le conseil de sa mère. Mais Isabelle de Portugal est morte le 17 décembre 1471. Et le voilà sans conseil attaquant la France aidé aussi par le roi d’Angleterre et le roi d’Aragon. Le siège de Beauvais en 1472 va éviter le démembrement de la France.

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Le duc de Bourgogne franchit la Somme (14 juin 1472)[]

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Charles le Téméraire franchit la Somme (14 juin 1472).

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Charles Le Téméraire entrant à Nesles (14 juin 1472).

Le 14 juin 1472, Charles le Téméraire rompt la paix de Péronne, car il accuse Louis XI d’avoir empoisonné Charles de France (1446 - 1472), le duc de Guyenne.

Le 14 juin 1472, à la tête de 80.000 hommes, le duc de Bourgogne, aidé par Jean II d'Alençon, franchit la Somme à Bray[21], qu'il ruine. Il dispose de plus de moyens financiers, de plus de soldats et d'une meilleure artillerie que Louis XI. En effet, comme le duc de Bretagne François II, tente simultanément d'attaquer le royaume de France, Louis XI et la moitié de l'armée royale doivent lutter contre les Bretons, sans que ces derniers ne passent la frontière du duché d'Anjou[22].

Charles le Téméraire prend la forteresse de Nesle, après une vague tentative de résistance. N'appréciant pas que les partisans du Roi ne respecte pas leur capitulation, Antoine de Bourgogne fait mettre en sûreté Madame de Nesle, ainsi que ses serviteurs, puis les assiégeants se précipitent dans la ville ou ils commencent un effroyable carnage[23]. Le Duc de Bourgogne arrive, et tout n'en devient que plus cruel. La ville de Nesle est totalement détruite. Les francs archers ont le poing coupé. Les habitants, hommes, femmes et enfants sont massacrés.

Une guerre de fer, de sang et de feu, disent les commentateurs. Après avoir ravagé le Vermandois, la nouvelle du sac de Nesle se répand. Les habitants de Roye décident d'ouvrir leurs portes au duc de Bourgogne. Montdidier s'ouvre également à lui.

Les puissantes armées de Charles le Téméraire prennent d’assaut Vers, Lœuilly et Francastel, détruisent leurs châteaux en peu de temps.

Le Duc peut ainsi arriver sans encombre à Beauvais, ville picarde très riche, ruinée par des guerres perpétuelles[24].

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Le siège de Beauvais (27 juin - 22 juillet)[]

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Les débuts du siège (27 juin 1472)[]

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Attaque d'un camp de Charles le Téméraire lors d'un siège. Les 300 hommes d'armes de la garnison n'ont déjà pas assez de défenseurs à répartir sur les remparts.

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Louis XI envoie l'ordre à plusieurs de ses capitaines d'aller défendre Beauvais, mais ils ne sont pas prêts et bien inférieurs en nombre face à 80.000 hommes d'armes.

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Beauvais ville forte.

Charles le Téméraire veut poursuivre sa route vers la Normandie, pour réunir ses 80.000 hommes à l'armée du duc de Bretagne. Les bourgeois de Beauvais et le peuple accueillent des hommes et des femmes qui fuient les troupes du Duc. Ils se disent rescapés de grands massacres.

Les Beauvaisiens et les rescapés apprennent que le roi leur envoie des renforts. Louis XI envoie à Noyon l ordre aux capitaines de La Roche-Tesson et de Fontenailles, de venir immédiatement à leur secours avec deux cents lances (environ 1.500 hommes). Le maréchal de France, messire Joachim Rouhault de Gamaches (1409 - 1478), doit également se mettre en route, accompagné de deux cents lances d'ordonnance, et doit être bientôt suivi par un grand nombre d'autres troupes. Mais ces troupes ne sont pas du tout prêtes[25].

Arrivant devant Beauvais dès le 27 juin 1472, Charles le Téméraire ne s'attend pas à la ferme mobilisation des habitants et à la rapidité de leur riposte. Comme le connétable de Beauvais est en déplacement à Mello, avec une partie de la faible garnison, la ville est pratiquement sans défense. Elle ne peut normalement pas soutenir un siège bien longtemps. Le duc met donc le siège devant Beauvais[26].

Un héraut bourguignon somme donc la ville de se rendre contre la vie sauve. Les paysans picards des villages voisins qui ont échappé aux Bourguignons racontent des choses tellement effrayantes concernant l’ennemi que la ville refuse de parlementer.

Pourtant dedans la ville n'étoit que le capitaine de la dite ville, nommé Loys de Balagny, et trois cents hommes d'armes de sa compagnie, lesquels ne avoient que quelques armures, car huit jours devant les avoient perdues à Roye qui avoit été prise des Bourguignons; et n'avoient autres gens de guerre que les habitants et gens du pays qui estoient retraits dedans[27].

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Premier assaut, porte du Limaçon[]

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Les Bourguignons entrent dans la ville par le faubourg de Saint-Quentin.

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La résistance des Picards et Picardes à Beauvais va permettre la victoire de la France.

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Siège de Beauvais, par Watteau.

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Les armées de Charles le Téméraire assiègent Beauvais, dans Le Miracle des Loups (1925).

Les 300 hommes d'armes de la garnison de Beauvais vont devoir affronter 80.000 soldats bourguignons.

Le capitaine Louis de Gomel, seigneur de Balagny, commandant les gens d'arrière-ban de Beauvais, et son lieutenant Jean Legoy décident de prendre les armes. A de vieux ou très jeunes nobles, s'ajoutent le peuple et les bourgeois. Ils s’improvisent alors piqueurs, archers, arquebusiers ou hallebardiers et courent aux remparts[28].

La Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours... voit qu':

Au milieu des préparatifs de défense, Jeanne Fourquet, poussée par un mouvement irrésistible, cherche une arme avec laquelle elle puisse combattre. Une petite hache, une hachette s'offre à sa vue : elle s'empare de cette arme, l'élève devant l'image de sainte Angadresme, patronne de la ville de Beauvais, et s'écrie avec force : « Glorieuse vierge, sainte Angadresme, aide et soutiens mon courage ! » Après cette invocation, elle sort de son logis, et parcourt toute la ville en criant : Aux armes ! On se rassemble, on l'entoure, on la suit; des groupes se forment dans toutes les rues, sur chaque place, on court, on se presse; chacun s'arme comme il le peut; les femmes, les filles, les enfants, les vieillards, tous veulent contribuer à la défense de leurs remparts. Les uns y apportent des armes de toutes espèces; les autres roulent des tonneaux pleins deterreoudepierres ; ceux-ci ploient sous le fardeau de grosses pièces de bois; ils sont suivis par des femmes et des enfants qui portent des paniers pleins de vin et des provisions de bouche. Ils redoutent à chaque instant d'être attaqués par les assiégeants; mais ils sont préparés à vendre cher leur vie[29].

Le premier assaut est commandé par Jacques de Montmartin, qui lance une forte attaque, 100 lances et 300 archers contre le fort Deloy, tenu par une quinzaine d’arquebusiers commandés par Louis de Gomel. Malgré les efforts inouïs des assiégeants, ceux-ci résistent, mais, écrasés par le nombre, les défenseurs se replient dans la ville.

Les Bourguignons entrent alors dans le faubourg de Saint-Quentin, embouchent la trompette de la victoire, se mettant à crier ville gagnée, ville gagnée, et, se croyant dans la ville, ils se mettent à piller les maisons, mais sont consternés, sous une pluie de flèches, de voir un peu plus loin la porte du Limaçon et les murailles de la ville.

Les assaillants sont contraints de se retirer dans l’église Saint-Hippolyte et dans son voisinage pour se protéger.

Revenus de leur surprise, les assaillants reprennent, jusque 9 heures du soir, leur assaut, dressent les échelles sur les murs, mais sous le bon usage des arcs, arbalètes, et couleuvrines des Beauvaisiens, les Bourguignons s’essoufflent, laissant beaucoup des leurs sur le carreau pendant que les assiégés ne perdent qu’un seul homme.

Finalement le premier assaut des Bourguignons, porte du Lymaçon, est repoussé. Les échelles manquent aux assiégeants, et les rares qu’ils ont sont trop courtes. Mais le succès semble si facile qu'ils se replient pour revenir plus nombreux et mieux équipés.

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Deuxième assaut, porte de Bresle[]

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Philippe de Crèvecœur.

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Le deuxième assaut a lieu porte de Bresle.

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Jeanne Hachette, la Jeanne d'arc picarde et laïque, porte de Bresle.

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Jeanne Hachette et la bannière qu'elle a prise aux Bourguignons dans les rues de Beauvais en 1472.

Au deuxième assaut, porte de Bresle, ils sont attendus avec détermination. Le second assaut est dirigé par le seigneur des Cordes, Philippe de Crèvecœur, seigneur d'Esquerdes (1418 - 1494), avec le gros de son avant-garde.

Les assaillants dressent des échelles le long des murailles et entreprennent courageusement l’escalade, toujours avec des échelles trop courtes et sous une pluie de projectiles meurtriers, que les femmes apportent aux défenseurs. Toutes les tentatives sont repoussées, et les pertes bourguignonnes sont importantes.

Les Bourguignons pointent alors deux canons sur la porte, qui ouvrent une énorme brèche à travers laquelle les Bourguignons tentent de pénétrer une nouvelle fois dans la ville, sans succès.

Louis de Gomel, quoique grièvement blessé lors de la retraite vers la porte du Limaçon, commande toujours la défense, exhortant les habitants.

Devant ces échecs, Philippe de Crèvecœur d'Esquerdes demande son aide au duc de Bourgogne, afin de venir à bout de la ville.

Les attaques se succédant, les assiégés ont l’idée de jeter une grande quantité de fagots enflammés sur ceux qui continuent de forcer le passage. Le feu se communique alors à la porte, et à la herse elle-même, obligeant les assaillants à se retirer.

Dès son arrivée, le duc pense que Beauvais serait prise une fois le feu éteint. Mais les habitants prennent soin de l’entretenir avec du bois provenant des maisons voisines, afin que leurs charpentiers et maçons puissent murer l’embrasure intérieure de la porte.

Un soldat ennemi ayant déjà planté son drapeau sur la muraille, à la portes de Bresles, le 27 juin, lorsque Jeanne parait et le précipite dans le fossé[30]

Pendant ce temps l’assaut redouble de violence au pied des murailles, les assiégés ayant désormais à lutter contre toute l’armée du duc.

Heureusement, Jean de Reims, seigneur de Troissereux, parti de Beauvais le matin vers Noyons afin d’y chercher des secours, arrive par la porte de Paris avec les seigneurs de La Roche-Tesson et de Fontenailles et 200 lanciers royaux, qui se dirigent immédiatement à la porte de Bresle, où ils repoussent les assauts des Bourguignons.

A 9 heures du soir, le duc de Bourgogne fait cesser les attaques sur les portes de Bresles et du Limaçon. Les assiégeants s’installant dans des tranchées, et dans les maisons de la chaussée Saint-Nicolas, les abbayes Saint-Quentin et Saint-Lucien et leurs faubourgs… couvrant une étendue de 20 kilomètres.

Ce 27 juin 1472, les Bourguignons voient bon nombre des leurs tomber sous les murailles de Beauvais, sans avoir remporté aucun avantage. Les assiégés ont seulement perdu un archer et trois bourgeois.

La situation est néanmoins désespérée. La garnison n'a ni troupes, ni artillerie, ni munitions de guerre et très peu d'armures. Elle est loin des armées du roi. Et le siège s'éternise. Le Mercure de France écrit :

Au dernier assaut, les hommes auroient été forcés, si les femmes ne fussent venues à leur secours, ayant à leur tète Jeanne Hachette[31].


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La tentative de fuite de l'évêque (27 juin)[]

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Une autre Jeanne devant un autre évêque de Beauvais indigne de ses fonctions.

Il est à noter que Jeanne et les femmes de Beauvais doivent aussi lutter contre la trahison de l'évêque, Jean de Bar.

Jean de Bar, pourtant nommé – en 1462 – évêque de Beauvais, sur intervention de Louis XI, plutôt que de songer à défendre sa ville, rançonne les bourgeois, fait jeter les refusants en d'obscures prisons. Quand il restitue un prêt, il ne rend jamais qu'une livre par écu et a de la haine contre les réclamants.

Alors que toute la population de la ville, et les paysans picards qui s'y sont réfugiés, se battent contre l'ennemi, leur évêque ne veut pas se battre. Pire, il les trahit et essaie de s'enfuir dès le début du siège.

Un bourgeois de Beauvais nommé Duclos couche en joue ce traître avec son arquebuse. La femme de Maître Jean de Brequigny montre beaucoup de hardiesse ce 27 juin 1472. Elle arrête l'évêque de la ville, au moment où il cherche à fuir la ville qui va être assiégée[32].

Ce genre d'attitude se retrouve fréquemment à toutes les époques dans la prélature. Réussissant à déserter le combat il va à Paris. Ses défenseurs disent qu'il propose 972 livres aux Parisiens pour aller secourir Beauvais. Mais ce n'est pas son argent mais une somme donnée par le roi pour entretenir la cathédrale. D'ailleurs, après la victoire, Louis XI ne lui pardonne pas sa fuite honteuse. Il fait saisir tous les biens de l'évêque.

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Les renforts[]

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André de Lohéac, maréchal de France.

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Franc archer du temps de Louis XI.

Le roi Louis XI de France qui est aux Pont-de-Cé, puis au Plessis-Macé, près d’Angers, donne des ordres pour que des secours soient dirigés en toute hâte vers Beauvais. Hélas le roi et son armée doivent aller jusqu'à Pouancé, afin de lutter contre celle du duc François II de Bretagne.

Le 28 juin 1472, le maréchal de France Joachim Rouhault de Gamaches arrive en renfort à Beauvais avec 100 lances d’ordonnance et prend le commandement de la place.

Le lendemain 29 juin, la ville est renforcée par :

- Le maréchal de France, André de Montfort-Laval, seigneur de Lohéac, gouverneur de la Picardie ;

- Louis, seigneur de Crussol, sénéchal de Poitou avec 100 lances ;

- Le sénéchal de Carcassonne avec 100 lances ;

- Gaston de Lyon, le sénéchal de Toulouse, avec sa compagnie ;

- Le sieur de Torcy accompagné par la noblesse de Normandie ;

- Le Capitaine Guillaume de Valée, avec environ 100 lances ;

- Le Capitaine Méry de Cohé, avec environ 100 lances ;

- Le sire d’Estouteville, prévôt de Paris accompagné par la noblesse de la ville et de la vicomté ;

- Le bailli de Senlis et les nobles du bailliage ;

- Antoine de Chabannes (1408 - 1488), comte de Dammartin accompagné de 100 lances ;

- Le Capitaine Jean Salazar, avec 120 hommes de la garnison d’Amiens ;

- Le Capitaine Esthevenot de Talauresse, dit Thévenot de Vignoles, avec environ 100 lances.


Le 7 juillet, 600 francs archers, venant de Saint-Quentin, arrivent à Beauvais. La ville de Beauvais est secourue particulièrement par Paris qui envoie en toute hâte un grand nombre de pièces d’artillerie, des couleuvrines, des arbalétriers, des canonniers, des pionniers et des vivres en abondance. Rouen envoie également des pionniers, arbalétriers, maçons et charpentiers, Orléans envoie de grande quantités de vin.

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Les dernières attaques[]

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Joachim Rouhault de Gamaches, commandant de la place-forte de Beauvais.

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Jeanne Hachette.

Le 30 juin les Beauvaisiens mettent le feu à l’église Saint Hippolyte, afin d’y déloger les Bourguignons qui y sont casernés. Durant leur fuite, ils sont assaillis par la mitraille des défenseurs.

Ce même jour, des espions bourguignons mettent le feu en trois endroits différents de la ville. Ce feu est éteint après 8 heures de lutte.

Charles le Téméraire fait faire les travaux afin de commencer un siège en règle. Il fait mettre à sec les fossés de la ville pour les combler de fascines, fait détourner le cours du Thérain un peu au-dessus des faubourgs, fait pratiquer des mines.

Jusqu’au 8 juillet, les Bourguignons restent sous leur tentes. Toutefois leur artillerie qui a pris position dans les faubourgs Saint-Quentin, Saint-Nicolas, Saint-Lucien et les jardins de Saint-Gilles tire continuellement pendant ces 15 jours.

Le 9 juillet le Duc de Bourgogne recommence les hostilités. Il fait mettre ses troupes en bataille entre les portes de l’Hôtel Dieu et celle de Bresles, qui sont immédiatement accueillies par des salves de canons de couleuvrines et de serpentines. Pour repousser ce nouvel assaut toute la population est là, en particulier les femmes qui encouragent les hommes. Les Bourguignons accueillis avec des grosses pierres, de la chaux vive, de l’huile bouillante, des cendres chaudes et de la graisse fondue, sont massacrées au pied de la brèche.

Après 3 heures de lutte acharnée, voyant qu’il perd son temps, le Duc Charles fait cesser l’attaque.

Cette journée, les Bourguignons perdent 120 tués dont le seigneur Despiris et environ 1.500 blessés.

Le 10 juillet vers 3 heures du matin, 300 à 400 habitants accompagnés d’une quinzaine de cavaliers avec à leur tête Jean Salazar entrent dans le camp Bourguignon pour les surprendre. L’entreprise n'est pas un grand succès. Ils perdent 3 gentilshommes, dont le sire de Gastine, et Salazar a son cheval tué sous lui. Ils réussissent toutefois à égorger plusieurs soldats, dont le seigneur Jacques d'Orson, grand-maître de l'artillerie du Duc, et ramènent dans les fossés deux canons qu’ils hissent ensuite dans la ville.

Cette expédition est suivie de plusieurs autres toujours fatales aux assiégeants. Le Duc de Bourgogne usant alors de la ruse fait envoyer des espions, sous divers déguisements afin d’incendier la ville. Mais ceux-ci sont pris et décapités.

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La fin du siège (22 juillet 1472)[]

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Bannière prise sur les Bourguignons par Jeanne Hachette.

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Ce jour là, Charles le Téméraire ne fuit pas, mais il doit renoncer à prendre la place-forte de Beauvais.

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Portrait d'Antoine de Chabannes.

Les Bourguignons perdent lors de ce siège de Beauvais environ 3 000 hommes dont une vingtaine de seigneurs.

Le 22 juillet 1472, après 24 jours de siège, Charles le Téméraire comprenant qu’il ne peut pas prendre la ville va au camp de La Rouge-Maison en incendiant sur 20 km à la ronde les villages, dont Marissel, Bracheux, Wagicourt...

Le 23 juillet, Charles le Téméraire campe près de Sarcus, brûlant au passage Songeons et Gerberoy. Le duc de Bourgogne se dirige ensuite sans obstacle vers la capitale de la Normandie en effectuant un mouvement tournant.

Le maréchal de France Joachim Rouhault de Gamaches croit d'abord que la levée du siège n'est qu’une ruse. Dès qu'il voit que les Bourguignons continuent vraiment leur route, il les suit avec Antoine de Chabannes (1408 - 1488), comte de Dammartin. Sans engager de combat, ils attaquent les convois, leur coupant ainsi le ravitaillement, et gênant leur marche.

Le Duc avance sans projet autre que celui de tout ravager. Les Bourguignons passant par Poix vers Aumale, viennent devant Eu et Saint-Valéry-en-Caux qui sont brûlées, saccageant et détruisant tout sur leur passage. Ils se présentent inutilement devant Dieppe, qui est une des plus puissantes places fortes du royaume, et mettent en cendres tout le riche pays de Caux, faisant démolir les villages et châteaux.

Charles le Téméraire vient ensuite aux portes de Rouen, où il a donné rendez-vous à l'armée de Bretagne afin de mettre le siège, et y passe quatre jours. Les fortifications et retranchements qui ont été renforcées mettent la ville hors de danger. Par ailleurs, Antoine de Chabannes (1408 - 1488), comte de Dammartin harcèle ses troupes continuellement, pour l'empêcher d’entreprendre un siège.

D'autre part l’armée bourguignonne commençait à souffrir de disette et les maladies y régnaient. Le Duc perd chaque jour quelques-uns de ses serviteurs, soit par la contagion, soit par les blessures qu'ils avaient reçues aux continuelles escarmouches. Par ailleurs, la solde n'était pas payée.

Le Téméraire quitte la proximité de la ville, met Saint-Georges-sur-Fontaine et toute la contrée entre Neuchâtel et Rouen à feu et à sang.

Peu de temps après le Duc se résout à revenir en Picardie et en Artois, en continuant à tout brûler sur son passage. En partant, il détruit entièrement la ville de Neufchâtel, puis se dirige sur Gaillefontaine, qu’il assiège, pille le bourg, l'incendie et démantèle la forteresse.

À peine s'est-il éloigné que les troupes du roi reprennent Eu et Saint-Valery-en-Caux, seules villes qu'il a conservées, et où il a laissé garnison. Dans sa retraite, il est sans cesse harcelé par Antoine de Chabannes (1408 - 1488), comte de Dammartin et le connétable, qui lui refusent bataille et fatiguent par des escarmouches son armée déjà excédée par la famine et les maladies.

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Bloc de 2 timbres Jeanne Hachette et Louis XI.


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RENOMMÉE DE JEANNE HACHETTE[]

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On n'est pas d'accord sur le véritable nom de l'héroïne de Beauvais. Philippe de Commines l'appelle Jeanne Fowquet, et P. Matthieu, dans son Histoire de Louis XI, Fouquet. Antoine Loysel, dans ses Mémoires du Beauvoisis, et les auteurs de L'Art de vérifier les dates, Jeanne Laisné.

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Jeanne Hachette au moyen-âge[]

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Jeanne Hachette (bouton en cuivre).

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Remise d'une charte aux bourgeois d'une ville (Angers) par le roi de France Louis XI en 1474.

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Colin Pillon, qu'elle épouse, en 1474, est tué au siège de Nancy, en 1477.

Joachim Rouhault de Gamaches donne à Jeanne le surnom d'Hachette. Ce surnom ayant été approuvé par le roi, Jeanne Fourquet va être désormais depuis appelée Jeanne Hachette.

Quelques jours plus tard, le maréchal Joachim Rouault ouvre les portes de la ville à Louis XI, venu savourer cette victoire. Que Charles le Téméraire ait dû lever le siège un 22 juillet, jour de la Sainte Marie-Madeleine, est pour le roi plus qu'un symbole, un signe du destin. Comme nombre de ses contemporains, il considère que la Grande Pécheresse délivre le verdict de Dieu. A Beauvais, elle a donné raison aux habitants, et en particulier aux femmes, dont tous les témoignages attestent qu'elles n'ont pas été seulement des auxiliaires, mais bien les âmes de la résistance.

Le roi Louis XI, pour témoigner aux femmes combien il est satisfait de leur conduite, ordonne par ses lettres-patentes, datées d'Amboise, au mois de juin 1473, qu'elles précéderont à l'avenir les hommes à la procession solennelle qui se fait tous les ans le 10 juillet, ainsi qu'à l'offrande, le 14 octobre, jour de la fête de sainte Angadrasme, patronne de la ville de Beauvais[33].

Jeanne épouse Colin Pilon en 1474. Le roi exempte de l'héroïne et des descendants de la taille et lui accorde une dote. Louis XI institue en son honneur la procession de l'Assaut[34].

Voici comment s'exprime, au sujet de Jeanne Fourquet, Louis XI, dans ses lettres-patentes données à Senlis, le 22 février 1474[35] :

En considération de la bonne et vertueuse résistance qui fut faite l'année dernière par notre chère et bien-aimée Jeanne Fourquet, demeurant en notre ville de Beauvais, allant contre des Bourguignons, nos rebelles et désobéissans sujets... Jeanne gagna et retira devers elle un étendard desdits Bourguignons... nous avons pour ces causes, et en faveur de son mariage, lequel a été par notre moyen naguère traité, conclu et accordé, et pour autre considération à ce, nous avons octroyé et octroyons, voulons et nous plait de grâce spéciale par les présentes, que ladite Jeanne Fourquet et son époux, chacun d'eux, soient et demeurent toute leur vie durant, ainsi que tous leurs descendans, à perpétuité francs, quittes et et exempts de toutes tailles qui sont et seront dorénavant mises et imposées par nous et notre royaume, quelque part qu'ils fassent leurs demeurances[36].

Colin Pillon, qu'elle épouse, en 1474, est tué au siège de Nancy. Jeanne, devenue veuve et sans postérité, épouse, après 1477, son cousin, Jean-Pierre Fourquet[37]. C'est de cette seconde union que descendent en première ligne les Fourquet d'Hachette.

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Jeanne Hachette de 1492 à 1789[]

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Antoine Loysel.

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Le Grand Ferré.

Antoine Loisel, célèbre jurisconsulte, Antoine Loysel, dans ses Mémoires des pays, villes, comté et comtes, évesché et évesques, pairrie, commune et personnes de renom de Beauvais et Beauvaisis, éditée en 1617, p. 255, a consigné, sur Jeanne Hachette et sur les femmes de Beauvais... :

Jeanne Laisné, dicte Fourquet, fille de Mathieu Laisné, de Beauvais, laquelle se monstra si courageuse au siège que Charles, dernier duc de Bourgongne, y mist du temps du roy Louis unzième, qu’elle arracha des mains d’un porte—enseigne son drappeau, lequel elle porta et présenta dans l’église des Jacobins. En reconnoissance de quoy le roy la maria avec Collin Pillon ; les affranchissant de toutes tailles et imposi— tions par ses lettres du XXII février M.CCCC.LXXIII[38].
Mais qu’est-il besoin de nommer particulièrement Jeanne Laisné, ny la femme de maistre Jean de Bréquigny, qui fut si hardie que d’arrester son évesque par la bride de son cheval, lorsqu’il voulut sortir de la ville, craignant le siège des Bourguignons, attendu que toutes les femmes de la ville en général se monstrèrent si vaillantes en ce siège qu’elles ont surmonté la vaillance des hommes de plusieurs autres villes...[39].

Mais, de ses anciens privilèges, la commune ne conserve plus guère au XVIIIe siècle que son autonomie fiscale. Depuis le siège fameux de 1472, la ville a été pour toujours exemptée de la taille, mais il lui a néanmoins fallu payer subvention et subside, taillon et dons de joyeux avènement[40].

Une tragédie d'un sieur de Rousset est intitulée : Triomphe du beau sexe. Jeanne Hachette, ou le Siège de Beauvais, est conservée en manuscrit à la bibliothèque du roi. Le dévouement de cette héroïne est aussi le sujet d'une tragédie de l'avocat Araignou, imprimée à Paris, 1766.

Louis XVI fait cadeau aux habitants de Beauvais d'un tableau représentant la défense de la ville où Jeanne figure en bonne place[41].

Le Grand Ferré (ou Ferret), paysan picard d'une force prodigieuse, qui défend pour Charles V le château de Longueil contre les Anglais, armé d'une simple hache, préfigure l'image de Jeanne Hachette, qui reprend elle-même celle de la Pucelle d'Orléans.

Avec les Lumières et l'affirmation d'une destinée nationale, le sacrifice patriotique déborde la défense d'un bien menacé pour dire la solidarité des combattants, et si Montcalm meurt devant Québec qu'il défend contre les Anglais, le chevalier d'Assas, un an plus tard, tombe en alertant son régiment d'une attaque ennemie, comme le jeune Bara (ou Barra), tambour de 13 ans surpris par une embuscade vendéenne, refuse de renier la République et le paie de sa vie.

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Jeanne Hachette de 1789 à 1871[]

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Statue de Jeanne Hachette.

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La place Jeanne Hachette.

L'empereur Napoléon, en 1806, rétablit l'antique usage longtemps interrompu, de célébrer la levée du siège de Beauvais. C'est que, pour lui, la France n'est pas un pays factice, né d'hier, renfermé dans les limites étroites d'une seule époque ou d'un seul parti : c'est une nation grande par huit cents ans de monarchie, non moins grande après dix années de révolutions; travaillant à la fusion de tous les intérêts anciens et nouveaux, et adoptant toutes les gloires, sans acception de temps ou de cause.

Pourtant, comme le dit "Le Mercure de France" en parlant de Jeanne :

Ses combats, qui rappelle les héroïnes de l'antiquité, et qui est supérieur à celui de Clélie, devoit être raconté avec une sorte d'enthousiasme : tout ce qui intéresse l'honneur français ne doit pas être indifférent à un historien de cette nation[42].

Pierre Fourquet d'Hachette, l'un des descendants de cette héroïne, reçoit du roi de France Charles X une pension de 1.500 francs, en reconnaissance des services rendus par son aïeule, Jeanne Fourquet, dit Hachette[43].

En février 1850, dans un article sur "Les on-dit de l'Histoire", Paulin Paris, spécialiste de littérature médiévale, affirme qu'elle n'est qu'un nom.

Le futur Napoléon III, le Prince-président, rend hommage à l'héroïsme de Jeanne Hachette. Une statue monumentale de l'héroïne, œuvre de Gabriel-Vital Dubray, qui trône au centre de la place de la mairie, est inaugurée par lui. Il déclare :

Ainsi, au quinzième siècle, à peu d'années d'intervalle, deux femmes obscures, mais animées du feu sacré, Jeanne d'Arc et Jeanne Hachette, apparaissent au moment le plus désespéré pour remplit une sainte mission.
L'une a la gloire miraculeuse de délivrer la France du joug étranger. L'autre inflige la honte d'une retraite à un prince qui, malgré l'éclat et l'étendue de sa puissance, n'était qu'un rebelle, artisan de guerre civile.

Et cependant, à quoi se réduit leur action ? Elles ne firent autre chose que de montrer aux Français le chemin de l'honneur et du devoir, et d'y marcher à leur tête[44].

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Jeanne Hachette de 1871 à 1945[]

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Robert Cottereau et Jeanne Fouquet. Extrait du film Le Miracle des loups, de Raymond Bernard, réalisé en 1924.

Dans L'Histoire de France, de Jules Michelet (1798 - 1874) apparaît une Jeanne Laisné héroïque :

La porte était enfoncée, peu ou point de soldats pour la défendre. Mais les habitants se défendaient (...). Les femmes vinrent se jeter sur la brèche avec les hommes ; la grande sainte Agadrême, qu'on portait sur les murs, les encourageait ; Jeanne Laisné se souvint de Jeanne d'Arc.

Son nom est donné à l'un des lycées de la ville, ancien lycée de jeunes filles (1914).

Sa mémoire est à nouveau réactivée en 1920, au moment de la canonisation de Jeanne d'Arc, par des républicains, partisans de la laïcité. L'image de Jeanne Hachette devient un équivalent laïc de Jeanne d'Arc. D'ailleurs, la défense de Beauvais, par Jeanne Hachette, constitue le morceau de bravoure du film Le Miracle des loups de Raymond Bernard, réalisé en 1924.

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Jeanne Hachette de 1945 à nos jours[]

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Quatre timbres Jeanne Hachette.

De Jeanne d'Arc à Jeanne Hachette, c'est bien l'image de la femme au combat qui assure le salut. Une difficile leçon pour les misogynes, du Moyen Age ou d'aujourd'hui.

Peut-être l'héroïsation du soldat inconnu, de rigueur avec l'inflation des victimes des guerres modernes, a-t-elle rendu le sacrifice des vierges, des humbles ou des enfants trop pittoresque pour survivre jusque dans les dictionnaires élémentaires ?

Néanmoins, la mémoire de Jeanne Hachette est aujourd'hui célébrée à Beauvais par des défilés en costumes d'époque le dernier week-end de juin, organisés par l'association Les Amis des Fêtes Jeanne Hachette. À cette occasion, les femmes précèdent les hommes dans le cortège.

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NOTES ET RÉFÉRENCES[]

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  1. Nicolas-Jules-Henri Gourdon de Genouillac, Les françaises à toutes les époques de notre histoire, A. Hennuyer, 1909, 466 pages, p.82.
  2. Gabrielle Claerr-Stamm, Pierre de Hagenbachle : le destin tragique d'un chevalier sundgauvien au service de Charles le Téméraire, Altkirch, Société d'histoire du Sundgau, 2004, 242 pages, p.113.
  3. 200 femmes de l'histoire : Des origines à nos jours, Yannick Resch, Eyrolles 2011
  4. France: dictionnaire encyclopédique, Volume 9, Philippe Le Bas, Volume 21 de L'univers, Firmin Didot 1843.
  5. 200 femmes de l'histoire : Des origines à nos jours, Yannick Resch, Eyrolles 2011
  6. Biographie universelle et historique des femmes célèbres mortes ou vivantes, Volume 3, Louis Marie Prudhomme, Lebigre 1830.
  7. Monuments français inédits pour servir à l'histoire des arts depuis le VIe siècle jusqu'au commencement du XVIIe, Nicolas Xavier Willemin, Éditeur chez Melle Willemin, 1839.
  8. L'histoire des femmes publiques contée aux enfants, Sciences sociales et sociétés, Claude Lelièvre, Françoise Lelièvre, Édition 2, Presses Universitaires de France, 2001. p.43.
  9. Images de la femme en Espagne aux XVIe et XVIIe siècles: des traditions aux renouvellements et à l'émergence d'images nouvelles, Volume 9 de Travaux du "Centre de recherche sur l'Espagne des XVIe et XVIIe siècles", Augustin Redondo, Université de Paris III, Publications de la Sorbonne, 1994.
  10. Beauvais Et Le Beauvaisis Dans Les Temps Modernes, Slatkine, 1977.
  11. 200 femmes de l'histoire : Des origines à nos jours, Yannick Resch, Eyrolles 2011
  12. Jean-Chrétien Ferdinand Hoefer, Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, Paris, Firmin Didot frères 1858, tome 23, p. 22.
  13. Nicolas-Jules-Henri Gourdon de Genouillac, Les françaises à toutes les époques de notre histoire, A. Hennuyer, 1909, 466 pages, p.82.
  14. Bataille de Montlhéry, Mort de Jean Fourquet....
  15. Biographie universelle et historique des femmes célèbres mortes ou vivantes, Volume 3, Louis Marie Prudhomme, Lebigre 1830.
  16. Bataille de Montlhéry, Mort de Jean Fourquet....
  17. Le Plutarque français: vies des hommes et femmes illustres de la France, avec leurs portraits en pied, Édouard Mennechet. 1838.
  18. Alfred Tranchant, Jules Ladimir, Les Femmes militaires de la France, Paris, Cournol 1866, p. 150-151
  19. A. Hugo, Histoire générale de France depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, Paris, H. I. Delloye, 1841.
  20. A. Hugo, Histoire générale de France depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, Paris, H. I. Delloye, 1841.
  21. Cérémonies et coutumes religieuses de tous les peuples du monde: représentées par des figures, Volume 8, Jean Frédéric Bernard, Illustré par Bernard Picart, Bernard 1809.
  22. Didier Feuer et Jean d'Hendecourt, Dictionnaire des Souverains de France et de leurs épouses, p. 277, Pygmalion, Paris 2006.
  23. A. Hugo, Histoire générale de France depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, Paris, H. I. Delloye, 1841.
  24. Biographie universelle et historique des femmes célèbres mortes ou vivantes, Volume 3, Louis Marie Prudhomme, Lebigre 1830.
  25. Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours avec les renseignements bibliographiques et l'indication des sources à consulter: Haag - Hennequin, Volume 35, Firmin Didot, 1861.
  26. Amable Sablon du Corail, Louis XI ou le joueur inquiet, Belin, 2011.
  27. Les hommes illustres du Département de l'Oise: bibliothèque du Beauvaisis: notices biographiques, critiques, analyses littéraires, citations d'ouvrages, documents particuliers, etc, Volumes 1 à 3, Charles Braine, Desjardins, 1858. p.99.
  28. Constant Moisand, Histoire du siège de Beauvais en 1472, 1847.
  29. Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours avec les renseignements bibliographiques et l'indication des sources à consulter: Haag - Hennequin, Volume 35, Firmin Didot, 1861.
  30. 200 femmes de l'histoire : Des origines à nos jours, Yannick Resch, Eyrolles 2011.
  31. Mercure de France, Volume 24, 1806.
  32. Cérémonies et coutumes religieuses de tous les peuples du monde: représentées par des figures, Volume 8, Jean Frédéric Bernard, Illustré par Bernard Picart, Bernard 1809.
  33. 200 femmes de l'histoire : Des origines à nos jours, Yannick Resch, Eyrolles 2011.
  34. 200 femmes de l'histoire: Des origines à nos jours, Yannick Resch, Eyrolles 2011.
  35. Histoire de Beauvais et du Beauvaisis, Volume 23 de Pays et villes de France, Jean Ganiage, Privat, 1987.
  36. L'Intermédiaire des chercheurs et curieux, Numéros 475 à 485, 1991.
  37. 200 femmes de l'histoire : Des origines à nos jours, Yannick Resch, Eyrolles 2011
  38. Monuments français inédits pour servir à l'histoire des arts depuis le VIe siècle jusqu'au commencement du XVIIe, Nicolas Xavier Willemin, chez Melle Willemin, 1839.
  39. Monuments français inédits pour servir à l'histoire des arts depuis le VIe siècle jusqu'au commencement du XVIIe, Nicolas Xavier Willemin, Éditeur chez Melle Willemin, 1839.
  40. BEAUVAIS AU XVIIIE SIÈCLE, Jean Ganiage, CNRS Éditions.
  41. Don par le roi Louis XVI aux habitants de Beauvais d'un tableau représentant la défense de la ville, Jeanne Hachette, Paul Bordeaux, Sté Académique de l'Oise, Paris, Feuardent, 1907.
  42. Mercure de France, Volume 24, 1806.
  43. Biographie universelle et historique des femmes célèbres mortes ou vivantes, Volume 3, Louis Marie Prudhomme, Lebigre 1830.
  44. La politique impériale: exposée par les discours et proclamations de l'Empereur Napoléon III depuis le 10 décembre 1848 jusqu'en février 1868, Napoléon III (empereur des Français), H. Plon, 1868.
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